Reportée en janvier 2020 suite aux mouvements sociaux de décembre, la Journée de la Plateforme sur la participation citoyenne a tenu toutes ses promesses.
Accueillis dans les locaux de l’université d’Artois à Arras, une centaine de participants a assisté aux présentations et débats autour de la participation citoyenne à la construction de politiques publiques.
La participation comme légitimation de la démocratie élective
En introduction, Myriam Bachir (université d’Amiens) rappelle qu’impliquer davantage les usagers dans le processus décisionnel est une question qui surgit au niveau mondial dans la décennie quatre-vingt. Elle est moins une initiative de mouvements militants que celle d’élus qui veulent légitimer la démocratie représentative tout en cherchant à contrôler les dispositifs. Myriam Bachir analyse cette émergence autour de trois types de démocratie : participative, délibérative et d’interpellation, et de quatre processus participatifs : information, consultation, concertation, co-construction. Cette dernière modalité suppose un véritable partage du pouvoir comme en témoigne des expériences significatives en Europe du Nord ou au Canada.
Co-élaborer les projets avec ceux à qui ils s'adressent
Une telle expérience de co-construction est menée par l’institut catholique de Lille sur la recherche inclusive. Hadépas permet ainsi à des personnes en situation de handicap de montrer que leur expertise d’usage est une forme de savoir dont pourrait bénéficier les politiques publiques. Le croisement entre cette expertise celle des universitaires a permis la co-constrution et la co-animation d’un module de formation sur le handicap pour des étudiants de licence.
Les première et troisième tables rondes de la journée abordaient de manières complémentaires des exemples de participation citoyenne à la construction de projet impactant leur environnement proche : projet UTPAS à Bailleul-Merville, mobilité dans les territoires ruraux ou observation sociale par le département du Nord, démarche Living Lab avec l’institut catholique de Lille, transport en bus dans la communauté urbaine de Dunkerque ou le déploiement d’Amiens for Youth à Amiens. L’hypothèse sur laquelle se basent ces expériences est que les citoyens savent trouver outils et ressources pour apporter de la valeur ajoutée à de nouveaux produits, à de nouveaux services, à de nouvelles organisations. C’est aussi, qu’au delà des aspects réglementaires comme les enquêtes d’utilité publique, aller chercher la parole des citoyens dans leur lieu de vie permet de co-élaborer avec eux des réponses adaptées à chaque situation locale.
Les usagers acteurs actifs du recueil des donnéesLa question de l’observation a été au centre de la deuxième table ronde, montrant comment des citoyens pouvaient là aussi contribuer à la production de données, pour la qualité de l’air (Atmo Hauts-de-France, Appa Hauts-de-France), pour la téléphonie (Région) ou encore dans le domaine du soin (ARS). L’utilisation d’outils collaboratifs comme des plateformes d’enregistrement de données ou de géolocalisation, ou des capteurs individuels mesurant ce qui se passe à proximité des personnes permettent, non seulement de faire évoluer la capitalisation des informations, mais d’impliquer les personnes dans un processus évolutif de modification de l’environnement. De leur côté, les patients traceurs témoignent de la qualité de leur passage dans les services hospitaliers et de leur ressenti. Cette proximité avec les usagers bousculent aussi les pratiques professionnelles et impose, par exemple, la vérification de leur compréhension des messages passés (littératie en santé).
En conclusion, Rodolphe Dumoulin, commissaire à la lutte contre la pauvreté, s’est montré intéressé par ces expériences de co-construction qui rejoignent les ateliers citoyens mis en œuvre par la refonte du Conseil national de lutte contre les exclusions.